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10 septembre 2010

Salta - L'ambivalente

    Ancrée au pied des Andes, Salta est la ville la plus touristique du nord ouest argentin. Elle reste l'une DSC_0123__R_solution_de_l__cran_des destinations favorites des touristes qui tombent rapidement sous son charme: architecture coloniale, impressionnants monuments religieux, printemps perpétuel, profusion de musées, bars et peñas. Bien que comptant près de 500 000 habitants, elle a su gardé l'esprit de village.

Cela fait maintenant plus d'un mois que nous vivons et travaillons à Salta, côtoyons des salteños et salteñas de tout âge, de toute catégorie sociale, ce qui nous a permis de voir au-delà de cette façade pittoresque, et ce qui frappe lorsque l'on prend le temps de gratter la surface, c'est l'incroyable ambivalence qui caractérise Salta.

La religion : clef de voûte sociale.

    Mélange de descendants d'indiens (peuple Quilmes, Chañares, Quechua, Talapaso, Incas entre autre) et de colons européens, la population de la Province de Salta vit au rythme des fêtes religieuses, héritage de leur histoire mouvementée.

Aujourd'hui encore, les rites et croyances andines persistent et sont suivis par bon nombre de gens, essentiellement les populations paysannes qui vivent à l'extérieur de la ville et qui ont su conservé la culture de leurs ancêtres. Religions polythéistes, elles portent le culte de la Terre et de la Nature. Le long des routes vous rencontrerez des sanctuarios, en hommage aux différents dieux. La célébration la plus significative est la Fiesta de la Pachamama (le mère nourricière, Mère Nature) le 31 août qui réunit, autour d'un immense autel improvisé dans le désert de Tolar Grande, des milliers de fidèles qui viennent déposer des offrandes, essentiellement de la nourriture et des boissons, pour remercier la Pachamama de sa bienveillance et s'accorder sa bénédiction avant la venue du printemps. Les adeptes de cette religion ont pour habitude de déverser un peu de leur boisson (café, maté, vin, bière) quand ils se servent un verre, afin de nourrir la Terre, qui leur transmettra en contre partie ses bienfaits. DSC_0109__R_solution_de_l__cran_

    Cependant dans la ville même de Salta, le catholicisme reste la religion dominante.

Fondée en 1582 par l'espagnol Hernando de Lerma, Salta, comme le reste des territoires occupés par les conquistadors, a été rapidement évangélisée. De l'époque coloniale subsistent aujourd'hui de magnifiques édifices religieux parfaitement conservés: l'atypique cathédrale rose sur la Plaza 9 de Julio, l'audacieuse Iglesia San Francisco aux exubérantes façades magenta et or, le solennel Convento de San Bernardo refuge des carmélites, sans compter les dizaines d'églises éparpillées dans le reste de la ville.

À Salta, bien plus que dDSC_0147__R_solution_de_l__cran_ans le reste de l'Argentine, la religion occupe une place prépondérante. Il suffit d'observer les gens dans la rue, dans le bus: huit personnes sur dix se signent en passant devant une église. De fait, les manifestations religieuses sont célébrées dans la démesure.

La plus frappante est la Fiesta del Señor et de la Virgen del Milagro, du 6 au 15 septembre, qui a réuni 200 000 personnes l'année dernière. Pendant quinze jours, trois messes sont dites en la cathédrale et à chaque travailleur est octroyé au moins un jour de congé pour s'y rendre. Des hauts-parleurs sont installés dans les rues afin de retransmettre les offices du milagrito (le 6 septembre) au cours duquel les élèves de toutes les écoles défilent dans les rues en exultant ''iglesia, iglesia'', et du milagro (le 15 septembre) où des milliers de catholiques, de la ville et la province de Salta, de tout le pays, se réunissent en procession. Les catholiques des villes de San Antonio de los Cobres, à 168 kms de Salta, et des Vallées Calchaquies Iruya, à 200 kms de la capitale, font le pèlerinage jusqu'à la cathédrale salteña à pieds.

L'origine de la Fiesta del Milagro

A la fin du XVI ème siècle, arriva au port péruvien de El Callao, l'image sacrée d'un Christ crucifié grandeur nature, seul vestige de la cargaison d'un navire espagnol ayant coulé. Celui-ci transportait une commande religieuse pour l'évêque de Tucumán, Fray Francisco de Victoria, qui souhaitait l'offrir à Salta à l'occasion des dix ans de sa fondation. L'évêque offrit donc à la ville ce qui avait pu être sauvé du naufrage, mais l'icône du Christ fut rapidement oubliée par les salteños.

Un siècle plus tard, le 13 septembre 1692, toute la province de Salta fut ébranlée par un puissant tremblement de terre. Le prêtre José Carrión reçut alors en rêves la révélation selon laquelle le tremblement de terre prendrait fin si les salteños ressortaient les images del Señor et de la Virgen Maria offertes cent ans plus tôt et les honoraient en les exhibant dans les rues. Et les secousses cessèrent effectivement après la procession.

Depuis, afin de remercier le Christ et la Vierge, les salteños les célèbrent la deuxième semaine de septembre.

Ce fervent catholicisme, quelque peu effrayant, se retrouve jusque dans les écoles publiques où le catéchisme est souvent obligatoire et où les enseignants ''llenan la cabeza de los jovenes'' dixit un salteño, avec des préceptes d'autres temps. En pratique cela donne une population très fermée à l'homosexualité, bien que l'Argentine ait autoriser en juillet le mariage homosexuel, et totalement opposée à l'avortement (toujours interdit dans le pays sous la pression des catholiques), d'où la prolifération impressionnante de jeunes femmes enceintes et de bambins. 

Devant une telle ferveur religieuse, on est en droit de penser que le couple est sacré, que la monogamie est ancrée dans les mœurs et ce sans compromis possible. Que nenni !

Les relations homme-femme: tu fais le chat et je suis la souris ?

    Bien sûr, en venant dans un pays latin on s'attendait à rencontrer quelques spécimens du macho typique, je roule des mécaniques et je siffle les filles. Cependant, Salta dépasse de très loin cette image stéréotypée.

    Les salteños sont réputés pour être des dragueurs invétérés mais la frontière entre dragueur et pesado y bavoso est mince. Alors, oui, d'accord, dans 75 % des cas un homme vous tiendra la porte, vous laissera passer devant, vous cèdera sa place dans le bus ou vous aidera à porter vos courses. Néanmoins, dans 95 % des cas il vous déshabillera du regard ostensiblement, vous sifflera quand vous marcherez dans la rue, vous glissera un ''hola'' quand vous le croiserez, vous enverra des baisers en passant en voiture. Serait-ce le printemps perpétuel qui règne sur Salta tout au long de l'année, qui est à l'origine de cette débauche d'hormones surexcitées ? Nous nous posons sérieusement la question depuis un mois et voici ce qu'il ressort de nos observations.

Tout d'abord, il faut se montrer. Sortez un vendredi ou un samedi soir à la Balcarce, la noche de Salta, faites un tour dans ses bars et boliches, et vous comprendrez. Les chicas sortent leur plus beaux habits, souvent inspirés de la mode des telenovelas : rouge à lèvres rouge pompier, mini-jupe, leggings léopard; et les chicos arborent leur plus belle coiffure (vous vous souvenez des coupes de cheveux des footballeurs des années quatre-vingts ? Court devant et long derrière ? Ben voilà, c'est ça leur plus belle coiffure). Les pions se mettent en place et la partie commence. Les chicas tournent et tournent, se pavanent, se remaquillent, se recoiffent, mais ne dansent pas. Surtout pas, faudrait pas que j'ai l'air ridicule et puis je sais pas danser avec des talons de 18 cms de haut. Les chicos observent, se trémoussent un peu, c'est toujours mieux pour attirer les filles, verrouillent leur cible et passent à l'attaque. Je te prends la main, je danse la cumbia avec toi, je t'offre un verre. Rituels très proches de ceux qui ont lieu en France me direz-vous. À la différence près, qu'une fille ne refusera jamais une danse et que taper la main de son prétendant ou pousser un cri proche des ultra-son ne fait pas partie des coutumes salteñas, vous passerez à coup sûr pour une folle.

Je vous entends déjà dire « Non, mais là Florie, tu vas un peu loin. Ils sont en boîte, ils sortent pour s'amuser. » et je vous répondrais « C'est exact, ils sortent pour s'amuser, mais s'amuser implique-t-il d'être infidèle ? »

Car le vrai ''problème'' est là. Hommes comme femmes, vous dragueront sans scrupule même s'ils sont en couple. « Uno para la seguridad, diez supleantes para divertirse » résume un peu leur conception du couple. À Salta, la grande majorité des couples sont infidèles, ils l'assument et ne s'en cachent pas. Il est normal de chercher de nouveaux compagnons sur internet ou de draguer ses collègues de travail.

    Cette liberté de mœurs s'explique par deux raisons. La première est la persistance des mariages arrangés. Pour faire bonne figure, une personne issue d'une bonne famille et qui possède deux noms de famille se doit d'épouser un partenaire de même rang social. Mariage de raison et non d'amour qui à la longue engendre l'infidélité. La deuxième raison, plus propre aux filles issues de classes sociales modestes, est le mythe du bel et riche hidalgo qui viendra les sortir de leur quotidien ennuyeux et sans saveur. Mythe entretenu par les telenovelas, réelle institution pour les femmes de 15 à 40 ans, qui à la longue ne cherchent à s'en sortir qu'en trouvant un bon parti. Alors elles sortent, elles tournent, elles testent...

    Salta, de par son mélange culturel, de par ses habitants qui restent les parmi les plus chaleureux que nous ayons rencontré jusque là, de par son climat incroyablement clément, est l'une des villes argentines qui a le plus à vous offrir.

En plus des habituelles attractions touristiques, elle possède ce petit truc en plus qui vous accroche, vous titille ou vous déplaît mais ne vous laisse pas indifférent.

Si vous y passer, faites attention ! Nombre de touristes y passent pour un week-end et y restent une semaine, deux, voire deux mois...comme nous.

Florie Ponsin

Photos : Mélissa Ndongo

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Commentaires
C
Bravo les filles!<br /> Les photos sont superbes, et le texte m'a épaté! Vraiment, je le trouve très bien écrit, passant de l'historique et du "sérieux" à la bonne poilade sur l'explication des couples et de la fête à Salta! <br /> Florie, je reconnais bien là ta patte et ton humour qui, quand je tombe dessus comme maintenant, me manque un peu! ^^<br /> <br /> Bon courage pour la suite, et comptez sur moi pour faire tourner votre blog : je vais faire pour mes jeunes du lycée (de la seconde au BTS Tourisme...) une liste de sites, blogs et autres pages Internet qu'ils peuvent consulter pour le plaisir ou pour travailler! Le vôtre sera dedans, bien sûr!!!!<br /> <br /> Prenez soin de vous, et à bientôt sur la Toile!<br /> Des BIZ!
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